Ressources numériques en sciences humaines et sociales OpenEdition Nos plateformes OpenEdition Books OpenEdition Journals Hypothèses Calenda Bibliothèques OpenEdition Freemium Suivez-nous

Danser sans école

Ce pas, je l’avais inventé la veille.

 Je n’ai pas appris à l’Opéra, moi, mais je danse comme je peux, parce que j’ai des idées.

Gazette des tribunaux, 11 septembre 1837

Suivant l’expression consacrée, ces mots appartiennent à une danseuse publique, c’est-à-dire une amatrice de danses festives qui participent aux évènements dansants programmés dans les nombreux établissements organisant des bals publics au XIXe siècle. Prononcés lors d’un procès d’outrage public à la pudeur attenté pour danse indécente, ces propos affichent une posture de provocation à l’égard de l’enseignement institutionnel, illustré symboliquement par son plus haut représentant, l’Opéra de Paris. Aux leçons de danse, la danseuse revendique au contraire l’autodidaxie (« je danse comme je peux »)  et l’improvisation (« je l’avais inventé la veille ») comme modes d’apprentissage de la danse.

Sans évincer le caractère autodidacte revendiqué par cette danseuse, ni le rôle anthropologique joué par le bal, plus précisément par l’expérience dansée vécue dans l’environnement festif du bal comme un mode d’apprentissage en soi;  il apparait en filigrane que si la danseuse n’a pas appris à l’opéra comme elle le dit, cela ne signifie pas pour autant qu’elle serait exempte de formation, ni même qu’elle ait pu apprendre à danser par d’autres circuits et dans d’autres lieux.

La spécificité du contexte d’énonciation d’un tel discours qui intervient dans le cadre d’une défense judiciaire invite à prendre de la distance vis-à-vis du caractère contestataire de la danseuse à l’égard de l’école de danse de l’Opéra. D’autant plus qu’a contrario, il est tout autant possible de déceler dans ses propos un désir réel ou habilement formulé d’accéder à une formation en danse afin d’en maitriser les règles (notamment sur le plan moral) et ainsi échapper à l’erreur du geste indécent !


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Camille Paillet (31 août 2023). Danser sans école. EnDansant. Consulté le 18 février 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/o8ji


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.